L’OUVROIR AUX EPINGLES

Au 12

L’ouvroir aux épingles d’ AMANDINE ROUSGUISTO

Proposée à la Galerie Chave depuis le 2 mars, cette exposition 

se termine le 11 mai 2019.

A découvrir dans le nouvel espace  « Le 12 ».

Épingler le désir ! Il faut un œil pour voir, et une main pour regarder. Ainsi semble nous parler Amandine Rousguisto, celle qui épingle le désir. Faire œuvre est un travail, un travail méticuleux. Mais avant de nous plonger dans la pensée, la promenade est nécessaire au milieu des créations infimes, monuments de légèreté et d’espace, d’absence et de respiration. Ce qui nous est donné, offert au regard, ce sont des œuvres d’une singularité exceptionnelle. Il y a pour le spectateur, d’abord, de la surprise : celle d’assister à la véritable rencontre d’un geste et d’un matériau inattendu, presque inconnu, que l’on semble soudain dé-couvrir. Qui n’a pas fréquenté de tissus, qui n’a pas tenu une épingle ? Tous pourtant vous diront que le mariage qui s’opère sous nos yeux n’est pas en blanc ! Mais formidablement insoupçonné, prometteur. Amandine est sur un fil, elle s’en saisit, l’agrippe, le tend, et fait mille liens. Elle choisit des matériaux humains, ceux d’une petite main, un fil, un tissu, une épingle. Des petits riens inno-cents élevés soudain, du brut au sublime. Elle semble nous dire que c’est ainsi que sont les hommes. Petite chose humaine, simplement disposée à la surface du monde, trouée, bancale mais qui tient dans son imparfaite condition, les moyens d’être autrement, de devenir. Que l’on ne s’y méprenne pas, le simple fil d’une existence décousue, peut être un fil d’or. Le voile qui semble évanescent, peut être pur lin, couvert de chaux, comme anobli. Il faut s’approcher, plonger le regard pour voir au de-dans, se laisser emporter par le détail, comme on peut l’être par l’inflexion soudainement déroutante que prend un ami qui nous parle de lui, intimement. Venez encore plus près, glissez de détails en détails, laissez-vous emporter par les songes. Qu’est-ce qu’il y a au derrière ? Le regard va-t-il transpercer l’œuvre comme l’épingle ? Et puis soudain, on se demande, de quoi est fait notre plaisir, d’où vient cette fascination ? Dans l’alchimie des impossibles, Amandine nous a conviés à la rencontre des inconciliables. Dans les tensions infinies produites par les amoncellements d’épingles, le minéral épouse le végétal, comme la pulsion que l’on dompte, et qui devient une caresse. Cette œuvre est faite de matière simple et pourtant luxueuse, élevée par le geste. Car ce geste, ces gestes, répétés, méticuleux, puis libres et souverains sont conduits par le désir. Et la joie devient simple, on se dit que c’est beau. D’avoir rencontré l’impossible sans pouvoir le saisir, comme on découvre le cœur d’un ami. Guillaume Roux

Amandine Rousguisto, née en 1980, vit à Vence.

Elle a une formation de technicienne du spectacle et un diplôme universitaire : Interaction : art et psychothérapie.Elle a réalisé sa première exposition à la galerie en 2013.Aujourd’hui, elle nous présente un spectacle, dans une nouvelle mise en scène avec des vêtures revisitées auxquelles elle associe des éléments de recherche, d’une part sur la fonction de l’épingle et des étoffes et d’autre part sur cette pratique fantasmée du reprisage et rapiéçage où se mêlent réalité, imaginaire et symbolique.